Interview de Vincent Descoeur
Comment peser sur les décisions quand on n’est pas dans la majorité ? Est-ce que vous utilisez davantage le levier médiatique pour cela ?
Les députés d’opposition disposent d’un droit d’amendement que j’utilise largement, même si nous sommes confrontés à une majorité pléthorique et disciplinée qui, depuis le début de ce mandat, n’a pas fait preuve d’une grande ouverture et rejette assez systématiquement nos propositions.Dans ce contexte, j’observe toutefois que les amendements ou propositions de loi présentés par des députés d’opposition, s’ils ne sont pas directement adoptés, sont souvent repris par la majorité ou contribuent à infléchir sa position. Persévérer et être très présent en commissions comme dans l’hémicycle permet d’obtenir des résultats. Les médias sont bien sûr un moyen efficace d’interpeler le gouvernement en prenant l’opinion publique à témoin. Je saisis les occasions qui peuvent se présenter pour m’exprimer dans les médias sur les sujets qui touchent au quotidien des Français et plus encore ceux qui vivent en milieu rural. Cela a été le cas sur la question de la mobilité et des transports qui concerne tout le monde.
Vous êtes particulièrement audible sur Facebook (chacun de vos posts est partagé 24 fois en moyenne). Comment utilisez-vous les réseaux sociaux pour être entendu ?
Les réseaux sociaux sont devenus un moyen de communication incontournable pour un élu, un moyen privilégié d’échanger avec nos concitoyens qui attendent de nous que nous les tenions informés de nos activités ou prises de position. Je m’oblige à gérer personnellement mes publications au travers desquelles je m’emploie à rendre compte aussi régulièrement que possible de mon activité, qu’il s’agisse de mes interventions à l’Assemblée nationale, de mon travail en commissions ou de mes déplacements sur le terrain.
Peut-on dire que la proposition de loi que vous avez déposée en juin 2018 sur les 80 km/h (et son relai dans les médias) ont pu influencer les Gilets Jaunes et, in fine, la majorité ?
Pour beaucoup d’observateurs, les 80 km/h et la hausse des taxes sur les carburants ont été identifiés comme les détonateurs de la crise des Gilets jaunes, qui n’ont pas eu besoin de moi pour se rendre compte qu’il allait devenir de plus en plus difficile et de plus en plus coûteux de se déplacer ! Cette limitation de vitesse à 80 km/h -imposée sans concertation- a été vécue comme une profonde injustice dans les départements éloignés des métropoles et dépourvus d’infrastructures modernes de transport. A l’heure où tous les investissements visent à gagner en temps et en productivité, elle les condamne au ralentissement. Elle a été perçue comme une mesure technocratique, déconnectée des réalités, qui a sans aucun doute alimenté le sentiment d’abandon exprimé par les habitants de cette France dite « périphérique ». Ma proposition de loi sur l’assouplissement de cette mesure, comme mes différentes interventions ou les amendements que j’ai défendus, avaient évidemment pour objectif d’interpeler le gouvernement et sa majorité qui, au final, ont repris en partie mes propositions dans le projet de loi d’orientation sur les mobilités. Mais en partie seulement, puisque le Premier ministre a refusé d’étendre cet assouplissement aux routes nationales… ce qui est absurde et créera immanquablement de la confusion et me vaudra de continuer à lutter pour plus de cohérence et une meilleure lisibilité.
Juin 2019